Cycle de l'azote dans un aquarium

Le cycle de l’azote sans efforts

F. Mattier

Tout aquariophile le sait : le cycle de l’azote est important dans un aquarium.

S’il ne le sait pas, il l’apprend de la bouche du vendeur de l’animalerie qui lui rappelle qu’on n’introduit pas de poissons dans un aquarium nouvellement installé sans attendre 3 à 4 semaines que le « pic de nitrites » soit passé, et ceci grâce aux bactéries qui se développent dans le filtre.

Ça, c’est le dogme.

Celui qui permet au vendeur de vous convaincre d’acheter la fiole magique de « conditionneur d’eau », la souche de bactéries tout droit sortie du labo et de son frigo, et bien sûr la valisette du petit chimiste pour mesurer ce fameux « pic ».


Mais, comme toujours, les choses sont plus nuancées, mais surtout plus simples pour celui qui veut un petit coin de nature aquatique apaisant, et pas un laboratoire d’analyses chimiques !


Lorsque j’ai créé en 2011 le concept d’aquariophilie naturelle low-tech, c’était avant tout par amour de la paresse et lassitude de passer plus de temps au service de la technologie qu’à regarder mon petit monde aquatique. Ce sont les découvertes faites lors de l’aventure du poubellarium, commencée en 2004, qui m’ont fait comprendre que tout cela était souvent plus utile au commerçant qu’au poisson !


L’azote existe dans tout ce qui est vivant. C’est même la marque du vivant.

Le vivant émet donc des déchets contenant de l’azote dans ses déchets : déjections, urine, renouvellement des tissus (feuilles mortes, mues), cadavre. Aussitôt, ces déchets se décomposent.

Des bactéries et des moisissures transforment cet azote en ammoniac. Et ça, c’est toxique.

Puis, des bactéries transforment cet ammoniac en nitrites. C’est aussi très toxique.

Enfin, des bactéries transforment ces nitrites en nitrates, qui sont moins toxiques et consommés... par les plantes. Et la bouche est bouclée : l’azote du vivant retourne au vivant !

Le manuel (et le vendeur) vous diront que chaque étape est assurée par une espèce de bactérie : les Nitrosomas transforment l’ammoniac en nitrites, puis passent la main aux Nitrobacter qui en font des nitrates. Le tout étant niché au cœur des masses du filtre.

Il faut donc, au début d’un aquarium, que les Nitrosomas aient le temps de fabriquer des nitrites (toxiques) pour que les suivants transforment tout cela en nitrates (moins toxiques). Et donc, en attendant que les secondes apparaissent, il y a un moment où les nitrites ne sont pas dégradés et cela produit le fameux « pic de nitrites ». On estime qu’il faut 3 à 4 semaines pour que les nitrites permettent aux Nitrobacter d’apparaître. Ensuite, le cycle est enclenché et les Nitrobacter étant en place définitivement, les nitrites n’ont plus le temps d’apparaître : ils sont mangés dans la minute !

 

Sauf que ça, c’est dans le manuel.


En réalité, on ne cesse de découvrir de nouvelles bactéries qui font elles aussi ce travail, aux côtés de celles du manuel. Et il en existe même probablement encore davantage.

Ce qui rend assez dérisoire la petite fiole de bactéries du marchand qui ne contient qu’une seule souche clonée d’une seule espèce censée enclencher le fameux cycle.


Dans les faits, on constate que ce redoutable « pic de nitrites » ne se produit pas toujours, et pas toujours non plus de façon très marquée.


Par exemple, si vous introduisez des invertébrés (ou l’eau les ayant contenus) dès le début de l’aquarium, ce n’est plus une seule espèce de bactéries que vous introduisez, mais des milliers (voire plus). Au lieu d’une expérience en laboratoire, vous faites travailler une biodiversité ultra-complexe et foisonnante. Non seulement vous aurez toutes les bactéries qui assurent le cycle de l’azote avant même qu’un pic de nitrites se produise, mais vous enclencherez aussi tous les autres cycles du vivant (phosphore, potassium, oligo-éléments divers et variés…).

Et surtout, tout cela n’a absolument pas besoin de la présence d’un filtre, ces bactéries travaillant parfaitement à l’aise dans le sable (chaque grain en est recouvert!) ou sur toutes les surfaces (feuilles, vitres, roches, etc.). On pense même que certaines vivent à l’état libre dans l’eau, sans support particulier.

Bref, comme dans n’importe quel point d’eau dans la nature !


Le filtre permet d’obtenir des nitrates, pas d’en réduire la quantité ne serait-ce que d’un seul gramme.

Exactement comme le fait très bien ce microbiote sans lui.

Ce sont les plantes, et elles seules, qui vont consommer (et donc éliminer) les nitrates, si elles ont assez de lumière pour vivre.

La nature est variée et complexe et, contrairement aux conditions d’un laboratoire, il y a toujours plusieurs espèces qui assurent la même fonction, chacune prête à prendre le relais si les autres faiblissent.

C’est pourquoi la biodiversité assure des cycles de façon beaucoup plus robuste.


La ZollaBox Démarrage est basée sur ce principe. Peu importe si les poissons finissent par manger les invertébrés qu’elle contient : c’est leur microbiote varié et innombrable qui sera installé durablement, chaque espèce microbienne, connue ou non, prenant sa place dans l’écosystème.

Les recharges de cette ZollaBox permettent de renouveler chaque année (c’est ce que je recommande) cet ensemencement, à la façon d’un rappel vaccinal.


Encore une fois. Laisser faire la nature avec sa complexité, au lieu de vouloir vainement maîtriser chaque paramètre, est plus simple et surtout bien plus reposant !

Sur-intervenir est toujours mauvais signe, car aucune action ponctuelle, sur un seul des innombrables paramètres d’un écosystème, ne peut faire autre chose que le déséquilibrer. Ce qui permettra au marchand de vous recommander la fiole suivante, puis encore la suivante !


L’artificiel demande un effort de tous les instant, pour tenir à bout de bras un équilibre profondément instable.

Le naturel s’équilibre seul, à condition qu’on mette à sa disposition toute la diversité possible, dans laquelle il puisera lui-même ses propres solutions.

Et là, le cycle de l’azote devient un spectacle qu’on observe depuis le canapé, pas un « problème » qui nécessite d’intervenir.

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2 commentaires

Bonjour,

Enfin quelques choses de constructif et non commerciale. Pour ma part, l’introduction d’invertébrés du moins dans un bacs nouvellement mis en haut est de 24 48h. Connerie ? Nan, juste du bon sens et de la logistiques (mais sûrement que je me prends encore trop la tête). Je vous explique mes expériences.
Au préalable, dans un bac communautaire (sain et naturel) j’ai toujours un “collier” de nouilles qui traîne dans un petit coin. Dans le nouveau bac qui va être rempli, je prépare mon sol bien humide, planté avec des bout de plantes à pousse rapide qui sont dans le bac communautaire et autres, faire la petite déco qui de toute façon va être chamboulé par ces cichlidés et je le mets en eau. Attendre 3 à 4h le temps que l’eau ce “pose” et allé pillé le bac communautaire d’un “collier” de nouilles que j’introduis dans le nouveaux bac mise en eau. Qui dit bactérie, dit développement.. donc pour que les bactéries prolifère au plus vite ? Chauffage ! Je chauffe le bac à 25°C pendant une nuit (au heure creuse pour pas faire de trous au porte monnaie), l’éteint le matin et une fois mon eau à température ambiante, j’introduis mes bestioles et invertébrés. Même une fois j’ai directement acclimaté des crevettes déclassé et rien d’alarmant pendant 2 mois environ. Le troisième mois elles ont servi de déjeuner à un groupe de cichlidé juvénile.
J’essaierai bien un jour d’introduire directement des poissons, du style guppy, barbu, pour voir. Mais peur de faire mourrir bêtement des poissons (il dit ça, mais il en élève certains juste pour les voirs ce faire mangé par d’autres).
Sûr ceux, merci Aquazolla !

GoodBass03

Tout a fait d’accord. J’ai eu des escargots lors des rodages de mes 6 bacs tous très plantés et jamais vu de pic de nitrites.notable.
Vive l’aquario naturelle !!!

Sébastien Maitre

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